Transformons les PME en ETI

Il faut aider les grandes PME à devenir de belles ETI

Il faut aider les grandes PME à devenir de belles ETI

Pour bien accompagner les PME dans leur idéal de croissance, il convient d’analyser et de cibler leurs besoins mais aussi évaluer leur potentiel de croissance, notamment par l’analyse de leur performance extra-financière. 

Réindustrialiser, vraiment ? Après avoir tourné le dos à cette branche d'activité, la France souhaite aujourd'hui la reconquérir. Les secteurs de l'aéronautique, du spatiale, du luxe, de l'agroalimentaire, et de la pharmacie, outre les enjeux de souveraineté qu'ils recouvrent, ont valeur de traction réelle pour notre économie.

Ces moteurs requièrent toutefois un carburant puisqu'en France la balance commerciale penche depuis vingt ans maintenant du côté de l'import au détriment de l'export. Ce carburant ne se traduit pas forcément en aide financière directe. Les entrepreneurs ont acté la fin du "quoi qu'il en coûte" hérité des funestes confinements des années 2020. Ils préfèrent largement assumer eux-mêmes le risque associé à leur pleine liberté d'investir.

Pour permettre à la France de retrouver une balance commerciale positive et à ses entreprises de se mêler à la compétition internationale, l'Etat, les Régions et les intercommunalités, doivent cependant créer les conditions pour permettre à leur PME d'atteindre une surface suffisante aux fins d'asseoir leur présence à l'international.

Or, les faits sont connus. Le nombre d'entreprises de taille intermédiaire (ETI), ces groupes comptant entre 250 et 5 000 salariés, sont à peine 5 000 dans l'Hexagone, contre 12 000 en Allemagne, 10 000 en Italie et autant en Grande-Bretagne.

A y regarder de plus près, la France compte de nombreuses "grandes PME" mais assez peu d'ETI flirtant avec la limite haute qui leur permettrait d'être considérées par la statistique comme de "Grandes entreprises". Certes la quantité ne fait pas la qualité, mais les entreprises qui ne sont pas à la maille présentent le risque de devenir des proies pour leur concurrentes étrangères capitalistiquement mieux armées.

Il existe bien sûr à cela une explication culturelle. Nombre de grandes PME régionales appartiennent à des familles et les fonds d'investissement sont globalement peu présents à leur capital. Il convient désormais d'accompagner ces sociétés dans leur capacité à franchir un cap de croissance. Accompagner les entrepreneurs dans la prise de décisions éclairées, peut jouer un rôle crucial dans leur développement. Les aider à identifier les opportunités d'investissement les plus prometteuses, évaluer les risques associés et élaborer des stratégies efficaces va permettre à ce tissu dense de grandes PME de devenir des belles ETI.

Gare aux évidences ! Les freins ne sont pas toujours où on le pense et ne se révèlent pas seulement économiques... mais psychologiques ! L'expression populaire "pour vivre heureux, vivons cachés" se traduit souvent dans ces entreprises familiales par une crainte de grandir, une fois un certain stade de développement déjà atteint. Une appréhension intéressante sur le plan sociologique... mais intenable économiquement sur le moyen-long terme !

Aussi, pour identifier régionalement les pépites et futurs ETI qui feront l'économie de demain, il convient d'adopter une méthode qui ne saurait se baser sur les seuls critères de rentabilité et de performance passée. Ces éléments constituent bien sûr un indicateur clé mais les critères extra-financiers doivent aussi être considérés avec égard. A L’aube de l’entrée en vigueur d’une directive appelée CSRD, introduisant pour ces PME une obligation de production d’un rapport de durabilité, la capacité à développer un modèle économique compatible avec les objectifs des accords de Paris sera un critère fondamental pour apprécier le potentiel de croissance de ces sociétés. En outre, l'innovation par le dépôt de brevet ; la capacité à se projeter vers l'international ; la qualité de la gouvernance et du management ; l'implication dans un écosystème et ses réseaux ; l'implantation géographique au regard de la main d'œuvre qualifiée disponible ; ainsi que le secteur d'appartenance de l'entreprise doivent également être évalués. Ainsi, l'organisation de filières de formation de pointe, au bénéfice des entreprises existantes, dans des territoires situés hors des métropoles, constitue un enjeu majeur d'aménagement du territoire dont tout le pays bénéficiera

Un point de vigilance : les PME les plus performantes et remarquables sont souvent positionnées sur des marchés de niche de secteurs en déclin. Les liquidations judiciaires dans le secteur du commerce de l'habillement ne sauraient masquer le dynamisme remarquable de certains industriels de filières textiles techniques ou artisanales du luxe, qui jouent les premiers rôles internationaux, ou y aspirent.
Ainsi, d'une méthode de repérage rigoureuse, ciblée puis encadrée, dépend notre politique d'accompagnement des entreprises à même d'assumer dans le présent ou un futur proche, le rôle de fleuron national et européen de leur industrie.


Tribune reprise par Les Echos